Bien des choses furent écrites sur les poètes et leur amour incommensurable pour l'absinthe.
Beaucoup sont devenus aussi célèbres pour cela (et c'est injuste) : Paul Verlaine, Charles Cros, Arthur Rimbaud, Raoul Ponchon, Maignan, etc... En tant que poète (c'est démodé, je sais et je l'assume), je me devais de rendre hommage à mes précieux prédécesseurs dans une mise en scène élégante et ancienne. Ce n'est finalement pas bien difficile puisque je dispose d'une machine à remonter le temps qui me permet d'aller chercher en un clin d’œil les objets qu'il me manque... directement au XIXème siècle. L'on peut donc admirer ici uniquement des éléments issus de notre beau passé Français, y compris l'absinthe présente dans le verre, préparée comme il se doit au goutte à goutte, comme l'on fait avant nous tant de beaux esprits. Patience et longueur de temps ... Je ne vous ferai pas l'injure de vous rappeler ce proverbe entièrement puisque nous sommes ici tous fous. Oui, fous, de cette littérature. La photo est argentique, fabriquée avec une chambre à soufflet. Développée comme l'on peut. Cette photo a été prise en plein jour avec une chambre ancienne et un objectif type Petzval datant de la fin du XIXème siècle. A-t-il, en raison de son grand âge et comme une amie me le suggérait, le pouvoir de photographier le passé ?
En tout cas, je ne m'explique pas l'étrange femme de profil, aux cheveux courts, que l'on aperçoit derrière la fenêtre et qui n'était pas là lorsque j'ai pris la photo. Effet d'optique ? Sans doute, mais il est vraiment étonnant que cet effet reproduise presque parfaitement un profil de femme, les yeux clos, la tête baissée ! C'est notre première collaboration musicale, née d'une nuit musicale, avec Kentin Jivek. Nos univers se ressemblent, mêlant mélancolie et ténèbres... Il n'est pas étonnant que ce titre sonne comme une homélie. Il y a derrière cette photo anodine... bien des heures de travail (deux jours en réalité). Invisibles et magiques. C'est probablement l'attrait et le mystère de la photo argentique, parfois demandeuse et accaparante. Elle nécessite un peu d'imagination, de technique et la compréhension de l'essentiel : la lumière. Je travaille toujours en lumière naturelle et ce n'est probablement pas le plus pratique, surtout à Paris, en appartement. Mais la lumière naturelle est une déesse alors je la respecte, même lorsqu'il lui manque la tête car ma fenêtre est trop petite et il arrive souvent qu'elle ne parvienne pas à passer dans son entière splendeur. Pour compléter le tout, mon appareil, ou ma chambre pour parler comme les initiés, accueille un objectif à focale fixe cela signifie que je dois m'adapter en gérant la vitesse et la lumière qui éclairent ma modeste scène (avec des voiles et des artifices en tissus). Cela semble infernal. C'est passionnant. La composition, l'agenouillement devant les règles de la nature pour tenter de lui accorder un résultat artistique est une expérience bienfaitrice. Cela rend humble. On parvient à ses fins... Ou pas. Quelle drôle de sensation de voir ses propres photos affichées en grand... Au milieu d'autres qui n'ont rien à voir... Le charme des contraires ... C'est une sensation étrange qui rejoint celles éprouvées lorsque je participais à des scènes ouvertes ; les musiciens jouaient d'anodines chansons de rupture ou illustrant une naïve joie de vivre... Des choses agréablement composées, un peu superficielles... Anodines ? Après, je jouais "Le Magasin des Suicides" ou "Phantom Wooer" (longue histoire) et l'animateur prévenait l'auditoire... Des titres qui ont éreinté mon âme, comme la plupart de ceux que je compose... Larges taches de sang sur l'opaline d'une vie ratée... Du sang qui a éclaboussé mon front alors que justement j'accrochais mes cadres et que l'un d'entre eux a chu... M'ouvrant le front largement. Baptisant cet événement insignifiant.
Décidément je ne suis pas de ce siècle ni celui d'avant... Heureusement, d'agréables rencontres ont brisé cet écran opaque. |
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Décembre 2022
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